Femmes, ne vous rĂ©duisez pas au silence – Sheikh Yusuf da Costa :

Ceci est une traduction d’une Sohba de Sheikh Yusuf da Costa (Order of South Africa) : https://www.naqshbandi.org.za/shaykh-yusuf-da-costa-women-do-not-silence-yourselves/

Une fois par mois, nous rĂ©unissons les dames pour qu’elles fassent une courte intervention sur un aspect de l’Islam. La plupart ont rĂ©pondu de maniĂšre admirable, et voir leur progression, notamment dans la maĂźtrise des idĂ©es religieuses, est vraiment fantastique. Je n’aurais jamais pensĂ© que nos dames pouvaient ĂȘtre aussi innovantes en matiĂšre de prise de parole en public. Pour ĂȘtre honnĂȘte, certaines de leurs interventions surpassent largement celles d’autres personnes.

Dans un certain sens, cela pose question. La prise de parole en public sur l’Islam a Ă©tĂ©, dans une large mesure, un privilĂšge masculin. À l’occasion, on permettait aux femmes de le faire, mais uniquement devant un public fĂ©minin. Il est trĂšs rare qu’une femme s’adresse Ă  un groupe mixte ou uniquement masculin. Quand j’écoute nos femmes parler d’Islam, je me demande : « Les avons-nous privĂ©es de certaines tĂąches qu’elles sont pourtant parfaitement capables d’accomplir ? Les avons-nous privĂ©es ? Les avons-nous volontairement rĂ©duites au silence ? » Je ne fais pas rĂ©fĂ©rence ici aux manifestations les plus primitives de l’Islam dans certaines rĂ©gions de ce pays, oĂč les femmes ne sont pas autorisĂ©es Ă  aller Ă  la mosquĂ©e ou Ă  parler pour que d’autres les entendent. Dans ces rĂ©gions, un lourd silence est imposĂ© aux femmes, et je constate qu’en Afghanistan elles ont Ă©tĂ© classĂ©es comme citoyennes de seconde zone. Il semble que beaucoup de gens aient une interprĂ©tation de l’Islam selon laquelle les femmes n’ont ni cerveau ni cordes vocales, ou que, si elles en ont, ce sont des appendices inutiles. Le cerveau et la voix appartiennent aux hommes : ce sont des organes masculins. VoilĂ  ce qui se passe dans certaines rĂ©gions du pays. Dans notre Tariqah, nous avons essayĂ© de lutter contre ce silence imposĂ© aux femmes, et nous leur permettons donc de donner de petites confĂ©rences sur diffĂ©rents aspects de la religion. Je ne crois pas qu’il y ait quelqu’un qui les ait Ă©coutĂ©es sans surprise. Autoriser les femmes Ă  s’exprimer sur des sujets religieux fait partie de nos efforts pour restaurer leur humanitĂ© donnĂ©e par Dieu.

Mais il existe un problĂšme majeur. Beaucoup de femmes ne veulent pas participer Ă  cette restauration de leur humanitĂ©. Nombreuses sont celles qui prennent part Ă  leur propre silence. Elles se perçoivent comme le gouvernement afghan les considĂšre : citoyennes de seconde zone, bonnes Ă  procrĂ©er et Ă  tenir une place domestique dans leur cuisine ou Ă  passer la moitiĂ© de leurs journĂ©es dans les magasins. Je trouve extrĂȘmement Ă©trange que des femmes, malgrĂ© les dons qu’Allah Tout-Puissant leur a accordĂ©s, ne souhaitent pas voir restaurĂ©e leur humanitĂ©.

À de nombreuses reprises, j’ai parlĂ© des grĂąces spĂ©ciales qu’Allah a accordĂ©es aux femmes et des rĂŽles intellectuels et spirituels qu’elles ont jouĂ©s dans l’Islam. Certaines femmes, comme Sayyidatuna Nafisah (r.a.), dont la tombe se trouve au Caire, furent des gĂ©antes spirituelles ; Ă  tel point que, lorsque le cercueil de l’imam Shafi’i (r.a.) passa devant sa maison, on le posa afin qu’elle puisse implorer Allah en sa faveur. L’Islam est riche en noms de femmes qui ont atteint des grĂąces spirituelles et intellectuelles particuliĂšres auprĂšs de leur Seigneur. Et toutes ont commencĂ© Ă  partir de zĂ©ro. Certaines femmes de notre Tariqah ne veulent mĂȘme pas commencer Ă  zĂ©ro, quelles qu’en soient leurs raisons. Notre Seigneur n’a privĂ© aucune femme des grĂąces particuliĂšres qu’Il a accordĂ©es aux hommes. Penser qu’Allah est injuste et qu’Il n’a accordĂ© certaines choses (Ă  l’exception de la ProphĂ©tie) qu’aux hommes relĂšve du sacrilĂšge. Ces idĂ©es, selon lesquelles seuls certains degrĂ©s cĂ©lestes seraient rĂ©servĂ©s aux hommes, ont Ă©tĂ© importĂ©es dans notre religion, et aujourd’hui mĂȘme des savants rĂ©putĂ©s tiennent des propos dĂ©nigrants Ă  l’égard des femmes. Chaque fois que je pense aux femmes et Ă  leur fonction cosmique — recevoir des Ăąmes du domaine cĂ©leste — je frĂ©mis devant l’ignorance masculine. Et chaque fois que je songe aux processus impliquĂ©s dans le sein des mĂšres, je frĂ©mis en pensant Ă  ce que beaucoup d’hommes pensent des femmes. Certains vont jusqu’à employer les mots « infĂ©rieures » ou « de seconde zone » pour qualifier une crĂ©ation de notre Seigneur. Or, toutes les crĂ©ations de notre Seigneur, de la plus minuscule Ă  la plus gigantesque, sont une expression de Sa perfection. Par Sa perfection et la gĂ©nĂ©rositĂ© de cette perfection, notre Seigneur n’a créé que ce qui est parfait dans toutes les espĂšces et toutes les formes de vie. Nous n’avons aucune comprĂ©hension des Ɠuvres de notre Seigneur, et c’est pourquoi nous employons des catĂ©gories dĂ©gradantes pour ceux qu’Il a bĂ©nis de grĂąces particuliĂšres. Lorsque je pense Ă  ce que les femmes ont accompli dans divers domaines Ă©ducatifs et spirituels Ă  travers le monde, je ne peux que dire : « Allahu akbar », en reconnaissance de la grandeur de notre Seigneur pour ce qu’Il a fait.

Je ne comprends pas pourquoi nous utilisons les diffĂ©rences de genre pour dĂ©clarer les gens « infĂ©rieurs » ou « de seconde zone ». J’ai dĂ©jĂ  posĂ© la question, et je la repose : « Dites-moi, dans quels aspects de la personnalitĂ© d’une femme — intellectuels, spirituels, Ă©motionnels — rĂ©siderait son infĂ©rioritĂ© ? Est-elle infĂ©rieure par son intellect ? Est-elle infĂ©rieure par sa spiritualitĂ© ? Est-elle infĂ©rieure par sa personnalitĂ© ? OĂč donc rĂ©side son infĂ©rioritĂ© et oĂč se situe son statut de seconde zone ? »

Quand nous pensons Ă  notre Seigneur, nous devons Le concevoir comme la Perfection Absolue, le Tout Parfait, le Subhan. Et ce que notre Seigneur a créé, sous quelque forme que ce soit, est l’expression de Sa Perfection Absolue. Le fait que les ĂȘtres humains, en particulier les femmes, se soient abaissĂ©s eux-mĂȘmes, et que cette dĂ©gradation ait eu un impact sur la perfection du processus crĂ©atif, n’est pas l’Ɠuvre de notre Seigneur : c’est la nĂŽtre. Je trouve extrĂȘmement triste que des savants, qui devraient savoir mieux, en sachent si peu sur le processus de crĂ©ation qu’ils Ă©mettent des dĂ©crets religieux insultant la Perfection Absolue d’Allah, Son ĂȘtre Subhan.

Ces femmes qui se cachent lorsque leur intellect ou leur spiritualitĂ© sont mis au dĂ©fi devraient se demander : « Qui sommes-nous ? » Voyez-vous, mesdames — si je puis vous appeler ainsi — dans cette Tariqah, nous vous offrons une merveilleuse opportunitĂ© de donner expression Ă  ce que notre Seigneur vous a accordĂ©. Quand vous niez cela, vous niez la perfection de la crĂ©ation humaine. Quand vous vous rĂ©duisez au silence, vous dites en fait : « Mon cerveau n’est qu’un appendice inutile. Il est seulement lĂ  pour s’occuper d’autres choses que de l’intellect. » J’ai honte de ce que vous pensez de vous-mĂȘmes. J’ai honte devant mon Seigneur de voir ce qu’Il vous a accordĂ© et ce que vous ĂȘtes prĂȘtes Ă  accepter. J’ai honte parce que vous avez acceptĂ© la dĂ©gradation qui vous a Ă©tĂ© imposĂ©e. Certaines d’entre vous devraient Ă©galement avoir honte d’elles-mĂȘmes.

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