La rose et l’épine font partie de la même plante
Bismillahi-r-rahmani-r-rahim.
Oui, nous devons remercier le Seigneur qui nous a autorisé à naître sous forme d’êtres humains.
Lui, LE Créateur de toutes les créatures, s’Il avait voulu nous créer chiens, mules, ânes, vipères, scorpions ou rats, quelles objections aurions-nous pu émettre ?
Il est Notre Créateur, et Le leur.
Aussi nous devrions être heureux d’avoir été revêtu sous cette noble forme.
Tant de gens viennent à moi, se plaignant de leurs vies, donc, parfois je leur demande :
« Auriez-vous préféré être nés sous la forme d’un rat ?
Je leur fais cette demande afin qu’ils se souviennent qu’ils doivent être reconnaissants et maintenir une attitude correcte à l’égard de leur Seigneur.
Essayer et maintenir cette attitude correcte est la première chose qui s’enseigne aux débutants de tous les turuq,*de tous les chemins soufi et dans toutes les quarante et une tariqa.
Quiconque soutient s’être uni à soi-même, et à un Sheikh, doit être conscient qu’il ne peut aller nulle part, jusqu’à ce qu’il puisse être heureux, pour tout ce que Son Seigneur a voulu qu’il lui arrive, que ce soient des choses douces ou amères.
Si vous avez l’espoir d’arriver au plaisir de Dieu, vous devez être reconnaissants à l’égard du Tout Puissant, et laisser de côté les plaintes.
Si nous sommes contents de Lui, Lui sera content de nous; mais si nous sommes dégoûtés de Lui, Lui le sera de nous aussi.
Et lorsque Notre Seigneur est dégoûté de nous….nous devenons des créatures désagréables et dangereuses, causant des dommages.
La clé du bonheur ici bas, et dans l’au-delà, est d’être dans le contentement de Notre Seigneur.
Mais peu de gens comprennent cette clé, et la plus grande majorité de l’humanité, passe sa vie en plaintes et lamentations.
La plainte est de fait le passe-temps préféré de la majorité de l’humanité.
Les gens cherchent toujours une opportunité pour se plaindre, créant même parfois des situations dans lesquelles ils pourront exprimer leur plainte obsessive.
Quand deux femmes se réunissent, c’est, en général, pour entendre leurs plaintes mutuelles.
Les hommes aussi sont de grands plaintifs, et dans une réunion d’hommes on peut en entendre une quantité !
Seul parfois, un petit groupe de personnes arrive à remercier Leur Seigneur pour les avoir crées comme la plus respectable et honorable de toutes Ses créatures, comme humanité et comme couronne de la création.
Devant tant d’ingratitude, de la part de Ses serviteurs le Seigneur dit :
« Oh Mon serviteur, tu te plains de ce que je t’ai crée dans le monde des humains ?
Il ne t’est jamais arrivé de penser que si tu avais été crée sous la forme d’un âne, 100 fois chaque jour, on te battrait avec un gros bâton, et tu mangerais du foin, et vivrais dans une étable ?
Et pour récompense d’avoir été crée dans le monde humain, tout ce que tu fais est te plaindre, en continuant indéfiniment insatisfait, et mécontent, tout le temps. »
Pour une personne qui prétend être uni à un Sheikh, dans une voie soufie, il es très important de cesser ces lamentations et d’être heureux de tout ce qui lui advient.
Ceci peut lui permettre de se souvenir que chaque événement ou état est le résultat de la Volonté de Son Seigneur.
Rien ne peut arriver, excepté ce que le Seigneur a bien voulu qu’il lui arrive.
Le fameux amoureux de Dieu, et grand poète Turc, Yunus Emre, a exprimé l’attitude d’un serviteur qui s’est donné complètement à Dieu de cette façon :
« Oh Mon Seigneur, tout ce que tu envoies sur mon chemin est bien, et j’en serai satisfait. Que ce soit une rose que tu me donnes, ou une épine, je les accepterai, également, avec la même satisfaction.
Mon Seigneur, que Tu me concède prospérité et succès, me revêtant d’un manteau d’honneur, ou que Tu envoies sur moi, de désastreuses afflictions en me revêtant d’un linceul, les deux me seront agréables puisque ce qui m’importe est que Tu le les aient envoyés, mais non ce qui est arrivé. »
Cette attitude est le plus haut niveau que peut avoir un serviteur face à Son Seigneur.
Lutter pour atteindre la perfection de cet attribut est l’objectif de chaque tarîqa soufie.
Dieu Tout Puissant se manifeste à Ses serviteurs, tant sous la forme de Celui qui envoie subtilement ses faveurs (Al-Latîf), que sous l’aspect de Sa force (Al-Qahâr), de Son Pouvoir de détruire, afin que tout se soumette à Sa Volonté, comme Lui Le désire, ou selon qu’Il ne Le veuille pas.
De même que la rose et l’épine font partie de la même plante, de même Dieu L’Unique peut donner dans ce monde des vies totalement différentes, divergentes même à différentes catégories de personnes.
Il peut faire que la vie d’une personne soit facile, et que la vie d’une autre soit une tragédie.
Etre fermes et « accepteur » lors d’une privation est une qualité que tous doivent rechercher, surtout ceux qui se disent soufis et qui suivent un Sheikh.
La présence ou l’absence de cet attribut est ce qui nous ligote à la condition des gens communs, ou au contraire nous permet de nous élever au-dessus du niveau de la multitude.
Je ne vous dis pas cela pour que vous pensiez que je suis si avancé, et que les gens communs sont si bas. Non ! La différence ne doit pas vous enfler, et vous donner une haute opinion de vous-même, en même temps qu’une basse estime pour les autres. Mais en revanche, vous devez considérer que ces réalités sont bénéfiques, car elles vous permettront d’atteindre le plaisir de Votre Seigneur.
Un tel comportement de plaintif n’est pas digne d’un soufi, car lorsqu’un soufi est piqué par une épine de Son Seigneur il doit dire :
« C’est bien pour moi, puisque Mon Seigneur me l’envoie.. »
Permettez-moi de vous offrir un conte.
« Il y avait une fois un gentilhomme aisé, qui alors qu’il cheminait dans ses jardins, accompagné de son serviteur, vit un piment qui croissait parmi ses vignes.
Il le coupa, et le mordit, mais le trouvant amer, il le recracha, et donna le reste à son serviteur pour que celui-ci le jette.
Mais au lieu de cela, le serviteur le mangea entièrement.
Surpris, notre gentilhomme lui demanda :
« Comment as-tu fais pour le manger tout entier ? N’était-il pas amer ? »
De la réponse du serviteur nous devons tirer une bonne leçon.
« O Mon Maître, j’ai si souvent mangé des douceurs de vos mains, que j’ai eu honte, pour une fois, de refuser quelque chose d’amer et le jeter, voilà pourquoi je l’ai mangé. »
Ces paroles contiennent une leçon qui nous servira tout au long de nos vies comme base, pour établir la relation adéquate, entre nous et Notre Seigneur.
Nous, en tant que serviteurs de Notre Seigneur, devons accepter tout ce qui vient de Lui, sans jamais le refuser, en disant par exemple :
« Ceci est amer, ceci me gêne…. »
Certainement notre ego déteste les piqûres d’une épine, mais la Sagesse Divine de l’épine est qu’à travers cette piqûre le bien arrivera.
Parfois, les gens vont chez le médecin, afin de se faire prescrire des injections. Personne ne les aime. Elles font mal, et ce n’est pas amusant que d’être piqués, mais à travers ces injections, la santé peut être améliorée, ou on peut être protégé.
C’est parce que nous sommes conscients du bienfait des vaccinations, ou des inoculations, que nous nous soumettons volontairement aux piqûres et injections, en les prenant même pour de bonnes choses.
Si nous pouvons accepter cela pour notre existence physique, nous devons de même admettre que cela peut être vrai pour nos vies spirituelles.
Un événement apparemment amer peut être une cause pour notre évolution spirituelle.
La piqûre d’une épine peut servir pour que sorte le pus d’un abcès, ou d’un furoncle, et permettre l’amélioration de notre santé, comme aider à nous purger de nos impuretés physiques.
De la même façon, il en est avec tout ce que notre ego déteste.
Pourtant, le bénéfice même amer, nous devons l’accepter et bien le recevoir, pour notre vie spirituelle.
Si nous pouvons atteindre cette haute station, la station de la satisfaction,( Maqam al Rida) et si nous continuons sans bouger devant toutes les privations jusqu’à les prendre comme des opportunités pour notre propre évolution, alors nous serons comme les poissons dans la mer profondes qui ne sont pas affectés par les turbulences d’une tempête au-dessus d’eux.
Dans ces moments, nous prendrons refuge, tout comme eux, dans les profondeurs, et nous ne serons pas secoués par les vagues.
Les poissons peuvent se mouvoir dans l’eau profonde des mers alors que l’écume et les vaguelettes sont remuées seulement sur la superficie de l’eau.
Ainsi dans cette station, vous bougerez librement dans la vie, et rien ne vous empêchera d’aller jusqu’à votre station spirituelle.
Mais pour cela, vous devez vous libérer vous-même des attaches des paroles excessives qui vous font ignorer votre destinée réelle dans cette vie.
La station de la Satisfaction et du Contentement est la Reine des stations, celle qui resplendit sur toutes les autres.
C’est l’objectif que nous devons vouloir atteindre.
Je ne prétends pas qu’aujourd’hui, ayant entendu cela, ou lu ceci, vous puissiez dès demain atteindre cette station. Non. Cela est très difficile.
Ce que je vous dis est qu’avec détermination, et un bon guide, vous l’atteindrez pas à pas.
Si quelqu’un se propose de monter à la Tour Eiffel, il doit commencer par le premier escalier, ensuite prendre le second, et ainsi de suite. De cette façon il atteindra la hauteur.
C’est cela la méthode, aussi, la connaissant, il serait idiot de proposer aux débutants de monter à la cime en un seul pas.
Notre méthode est celle du progrès, pas à pas, jusqu’à un noble objectif.
Si vous pouviez, au moins, réaliser un pour cent de toutes les pratiques recommandées, ce serait bien.
Mais zéro pour cent, non.
Le cent pour cent, est pour les Saints.
Comme nous sommes débutants, le un pour cent sera bien pour nous.
Nous devons essayer le meilleur pour être sûr de monter la première marche, même si c’est peu.
Mawlana Sheikh Nazim Al Haqqani (QS)